DEMOCRATIE

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mardi 23 juin 2009

L'Elysée présente un gouvernement remanié.


Après une journée d'intenses consultations, le président Nicolas Sarkozy a procédé mardi soir à un important remaniement ministériel. Les nominations, annoncées à 20 h 15 par le secrétaire général de l'Elysée Claude Guéant sur le perron de l'Elysée, donnent lieu à un mouvement de chaises musicales plus important que prévu.

La ministre de l'Intérieur Michèle Alliot-Marie a été nommée au poste de garde des Sceaux. Elle remplace ainsi Rachida Dati, élue au Parlement européen.

Le secrétaire d'Etat aux Affaires européennes Bruno Le Maire remplace pour sa part à l'Agriculture Michel Barnier, également élu le 7 juin au Parlement européen.

Brice Hortefeux est nommé à l'Intérieur et laisse les Affaires sociales à Xavier Darcos , lequel est remplacé à l'Education nationale par le secrétaire d'Etat à l'Industrie Luc Chatel qui reste porte-parole du gouvernement.

Comme l'a annoncé lepoint.fr , le directeur de la Villa Medicis, Frédéric Mitterrand , a bien été confirmé au poste de ministre de la Culture à la place de Christine Albanel. Le député UMP Pierre Lellouche remplace Bruno Le Maire aux Affaires européennes.

Le sénateur centriste Michel Mercier , trésorier du Mouvement démocrate (MoDem), a été nommé ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire.

L'eurodéputée Nora Berra est nommée secrétaire d'Etat "chargée des aînés" auprès du ministre du Travail et des Relations sociales.

Christian Estrosi
a été nommé ministre de l'Industrie.

Rama Yade
est nommé aux sports, a annoncé Guéant et le portefeuille des droits de l'Homme disparaît.

Marie-Luce Penchard
, conseillère technique à l'Elysée et secrétaire nationale de l'UMP chargée de l'outre-mer, est nommée secrétaire d'Etat à l'Outre-mer, en remplacement d'Yves Jégo.

Par ailleurs, Jean-Louis Borloo, Bernard Kouchner et Christine Lagarde sont confirmés à leurs portefeuilles respectifs du Développement durable, des Affaires étrangères et de l'Economie.

EMPRUNT NATIONAL, RETRAITES, RÉFORMES, REMANIEMENT... Nicolas Sarkozy : "Ayons le courage de changer"


Nicolas Sarkozy s'est exprimé lundi après-midi pour la première fois en tant que président de la République devant le Congrès réuni à Versailles. Voici, minute par minute, les principaux extraits de son discours.


15 heures : "J'ai conscience d'inaugurer un changement profond dans nos traditions républicaines. Une démocratie apaisée, ce n'est pas une démocratie où tout le monde est d'accord, mais où tout le monde s'écoute. C'est un moment important, je l'aborde avec gravité, avec humilité, tant la situation que nous vivons est sans précédent."

15 h 05 : "La crise n'est pas finie, nous ne savons pas quand elle se terminera. Nous devons tout faire pour que ce soit le plus rapidement possible. Rien ne sera plus comme avant. Une crise d'une telle ampleur appelle nécessairement une remise en cause profonde."

15 h 12 : "La crise annonce un monde où la demande de justice, de régulation, de protection sera plus forte. Le monde d'après la crise sera un monde où le message de la France sera mieux entendu, et mieux compris. Compte tenu de ses valeurs, la France sera mieux armée pour réussir."

"Donner plus à ceux qui ont moins"

15 h 14 : "Ce que nos pères ont fait avant nous, il ne tient qu'à nous de le faire à notre façon, et à notre époque. Le modèle de croissance de demain ne sera pas celui des 30 Glorieuses. La révolution numérique, écologique va transformer radicalement nos modes de consommation."

15 h 17 : "Dans le monde qui vient, notre savoir-faire dans l'articulation entre le service public et privé va redevenir un atout considérable. Pourquoi l'avenir est-il à ce point vécu comme une menace, et si peu comme une promesse ? Pourquoi un tel malaise ? Ce que nous ne faisons pas maintenant, nous ne le ferons pas plus tard. C'est le moment ou jamais de nous remettre en cause nous-mêmes."

15 h 19 : "Où en sommes-nous avec le principe de l' égalité ? Ne sommes-nous pas passés de l'égalité républicaine à l'égalitarisme ? Qui ne voit que notre modèle de l'intégration ne fonctionne plus ? Il produit de l'inégalité, du ressentiment. Pour atteindre l'égalité, il faudra savoir donner plus à ceux qui ont moins."

15 h 20 : "Où en sommes-nous avec la laïcité ? Je reste ferme sur l'idée que la laïcité, ce n'est pas le refus de toutes les religions. C'est un principe de respect, pour toutes les religions, pour toutes les croyances. Dans notre République, la religion musulmane doit être autant respectée que les autres religions. Le problème de la burqa n'est pas une problème religieux, c'est un problème de liberté, de dignité de la femme. Ce n'est pas un signe religieux, c'est un signe d'asservissement, d'abaissement. La burqa ne sera pas la bienvenue dans notre République française. Le Parlement a souhaité se saisir de cette question, c'est la meilleure façon de procéder. Il faut qu'il y ait un débat et que tous les points de vue s'expriment. Nous ne devons pas avoir peur de nos valeurs, nous ne devons pas avoir peur de les défendre".

REGARDEZ cet extrait du discours :



15 h 24 : "La liberté , ce n'est pas le droit pour chacun de faire ce qu'il veut. Quand il n'y a pas de règles, c'est la loi de la jungle. Le débat sur la liberté, c'est aussi le débat sur la sécurité, et sur les prisons . Quelle est la liberté de celui qui a peur de sortir de chez lui ? Comment peut-on parler de justice quand il y a 80.000 peines non exécutées par manque de place dans les prisons ? L'état de nos prisons est une honte pour notre République. Nous construirons donc d'autres prisons, des places dans les hôpitaux. Ce sera un impératif du prochain gouvernement."

15 h 27 : "Comment peut-on accepter que les règles qui s'imposent à toute la société ne s'imposent pas sur Internet? En défendant le droit d'auteur, je ne défends pas seulement la création artistique . Je défends aussi l'idée que je me fais d'une société de liberté où la liberté de chacun est fondée sur le respect du droit des autres. C'est aussi l'avenir de notre culture que je défends, c'est l'avenir de la création. Voilà pourquoi j'irai jusqu'au bout".

15 h 29 : "Pourquoi il est si difficile de réformer notre pays ? Malgré les efforts de tous, comment se fait-il que l'on ait obtenu si peu de résultats structurels en matière de chômage ? Comment se fait-il que tous ensemble nous ayons pris autant de retard ? La France a fait dans la durée un double mauvais choix : nous aurions dû faire beaucoup d'économies de gestion, et concentrer beaucoup plus de dépenses d'avenir."

Retraites : "Le temps de la décision viendra à la mi-2010"

15 h 31 : "Je ne ferai pas la politique de la rigueur parce que la politique de rigueur a toujours échoué. Je n'augmenterai pas les impôts car cela retarderait longtemps la sortie de crise et parce qu'en augmentant les impôts au niveau de prélèvements où nous nous trouvons, on ne réduit pas les déficits, on les augmente."

15 h 33 : "Il y a le mauvais déficit , qui finance les mauvaises dépenses. Il y a un deuxième déficit, imputable à la crise. C'est un amortisseur social. Il a bien fonctionné, mais il doit être résorbé après la crise. Il y a enfin le déficit qui soutient la croissance. Mais ce bon déficit ne doit profiter qu'à de bons investissements."

15 h 35 : "J'affirme que tout licencié économique, je dis bien tout licencié économique, doit pouvoir garder son salaire et recevoir une formation pendant un an. Je proposerai aux partenaires sociaux de prendre des mesures massives en faveur de l'activité partielle et d'étendre encore le contrat de transition professionnelle."

15 h 36 : "Le Grenelle de l'environnement est la dépense la plus rentable que l'on puisse imaginer. C'est un investissement."

15 h 38 : "Je souhaite que l'on propose une solution à tous les adolescents qui sortent du système scolaire à 16 ans sans rien. C'est un investissement incontournable pour la société française. Ça nous coûtera plus cher aujourd'hui, mais beaucoup moins demain. La réforme du lycée est indispensable. Il faut poursuivre dans la voie de l'autonomie des universités."

15 h 39 : "Nous serons au rendez-vous des réformes. Nous ne reculerons pas sur la règle du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux. Nous irons plus loin dans la maîtrise des dépenses de santé. Nous irons jusqu'au bout de la réforme des collectivités locales . On ne peut pas exiger de l'État d'être seul. L'effort doit être partagé. Nous ne nous déroberons pas devant la réduction du nombre des élus régionaux et départementaux. Nous ne nous déroberons pas devant le problème de la répartition des compétences."

"Mercredi, nous procéderons à un remaniement du gouvernement"

15 h 41 : "Nous serons au rendez-vous de la réforme des retraites . Quand viendra le temps de la décision à la mi-2010, que nul ne doute que le gouvernement prendra ses responsabilités."

15 h 42 : "Mercredi, nous procéderons à un remaniement du gouvernement. Son premier travail sera de réfléchir à nos priorités nationales et à la mise en place d'un emprunt pour les financer. Le Parlement, les partenaires sociaux, les acteurs économiques, de la culture, de la recherche et de l'éducation seront associés au débat sur ces priorités nationales dès le 1er juillet. Pendant trois mois, nous en discuterons ensemble, et les décisions ne seront prises qu'au terme de ce débat. Le montant et les modalités de cet emprunt, qui sera lancé soit auprès des Français soit auprès des marchés financiers, seront arrêtés une fois que nous aurons fixé ensemble les priorités."

15 h 44 : "Les délocalisations systématiques sont devenues insupportables aux Français. La fiscalité en est responsable. Je ne veux pas m'y résigner, ce serait suicidaire. L'idée d'une France sans usine et sans ouvrier serait une idée folle. La taxe professionnelle doit être supprimée."

15 h 46 : "Je souhaite que nous allions le plus loin possible sur la taxe carbone . Plus nous taxerons la pollution, plus nous allègerons les charges pesant sur le travail. C'est un enjeu immense. C'est un enjeu écologique. C'est un enjeu pour l'emploi. C'est un choix stratégique. C'est au nom de ce choix stratégique que la taxe professionnelle doit être supprimée."

15 h 47 : "Tout le monde a quelque chose à gagner dans un nouveau partage. C'est cela aussi le nouveau modèle de croissance. Il n'y aurait rien de pire que je pêcher par manque d'imagination."

15 h 48 : "La France change, mais l' Europe doit changer aussi."

15 h 49 : "Ce que je vous propose, c'est le mouvement. Ayons le courage de changer. C'est quand la France est convaincue que tout était possible, que la France était le plus forte."




































mercredi 17 juin 2009

Le scrutin européen à peine clos, la bataille des régionales commence !

Une élection chasse l'autre. Dix jours après le scrutin européen, les états-majors s'activent déjà pour préparer les régionales de mars 2010.

L'UMP. Le parti présidentiel avait subi, en 2004, l'une de ses plus sévères défaites électorales. Il ne gouverne aujourd'hui que deux régions sur vingt-deux et espère profiter de la dynamique des européennes pour en reconquérir quelques-unes : Champagne-Ardenne, la Lorraine, la Basse-Normandie et les Pays de la Loire. Il a aussi des visées sur l'Ile-de-France, Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte-d'Azur, trois régions où les Verts sont arrivés devant le PS.



Nicolas Sarkozy est aux manettes. Il va faire coïncider la campagne des régionales avec le débat sur la réforme des collectivités locales, qui sera soumise à l'automne au Parlement. Cette réforme, qui prévoit de simplifier l'organisation territoriale et pourrait aboutir à réduire substantiellement le nombre d'élus départementaux et régionaux, devrait être l'un des thèmes majeurs de l'intervention du chef de l'Etat, lundi 22 juin, devant le Congrès.

L'objectif avoué de l'UMP est de "ringardiser" le PS hostile à cette réforme et de créer des lignes de clivages avec ses alliés les Verts qui eux y sont plutôt favorables.

Le 30 juin, l'UMP arrêtera sa position sur le projet. Le même jour, se tiendra le premier comité de liaison de la majorité, qui réunit, l'UMP, les progressistes d'Eric Besson, le Nouveau Centre d'Hervé Morin et Gauche Moderne de Jean-Marie Bockel pour arrêter une stratégie sur les régionales. En septembre, le parti majoritaire relancera son processus de primaire pour désigner les têtes de listes dans les huit régions qui n'ont pas encore été pourvues.

Le Parti socialiste. Le scrutin du 7 juin a vu les listes d'Europe Ecologie faire presque jeu égal avec celles du PS. Il rebat les cartes au sein des majorités de gauche qui gèrent vingt des vingt-deux régions. Mardi 16 juin, Martine Aubry a déjeuné avec les présidents de région PS afin de "cadrer" la stratégie d'alliances. La priorité sera de réaliser, "partout où ce sera possible", le rassemblement avec la gauche dès le premier tour, - en particulier avec le PCF invité à constituer un groupe de travail - et les Verts.

Chaque tête de liste socialiste, dont la désignation aura lieu en septembre, sera chargée d'entamer les discussions avec les Verts "sur la base du travail réalisé en commun". Les socialistes, qui disent "reconnaître la volonté des écologistes d'exister", s'attendent à de rudes échanges. Ils espèrent - sans trop y croire - que les Verts sauront tempérer leurs exigences "afin de ne pas compromettre la victoire des équipes sortantes".

Les présidents de régions sortants restent pour la plupart favorables à des listes d'union dès le premier tour. "Les régionales de 2004 ont été gagnées sur une stratégie de rassemblement", relève François Bonneau, président de la région Centre. Jean-Pierre Masseret, le président du conseil régional de Lorraine, est plus inquiet. "Notre bilan à la tête de la région ne suffira pas à mobiliser les personnes qui souffrent le plus de la crise", s'inquiète-t-il en relevant les taux d'abstention importants dans les communes dirigées par la gauche PS et PCF.

La contre-performance des listes soutenues par François Bayrou aux élections européennes a atténué la controverse sur l'alliance avec le MoDem. Des accords pourront intervenir au deuxième tour à condition que les candidats MoDem se rallient sans réserve au projet de la gauche. Seul Jean-Jack Queyranne, président de la région Rhône-Alpes, a fait savoir qu'il envisageait de constituer, dés le premier tour, une liste ouverte à des candidats MoDem.

La direction du PS en a pris acte et n'a pas repris à son compte la position formulée par Bertrand Delanoë dans son entretien au Monde, daté du 16 juin. Au nom de la cohérence, le maire de Paris souhaitait exclure toute alliance avec le MoDem dés lors que celui-ci accepterait de passer des accords avec la droite dans d'autres régions.

Martine Aubry a par ailleurs fait savoir qu'elle était opposée à ce que Georges Frêche, exclu du PS à la suite de propos tenus sur le nombre de joueurs Noirs évoluant dans l'équipe de France de football, soit reconduit pour mener la liste de gauche en Languedoc-Roussillon.

Les Verts. Forts du succès obtenu par les listes Europe Ecologie (16,2 %) aux élections européennes, les Verts ont décidé de "partir en autonomes" aux régionales, en poursuivant le "rassemblement" des écologistes. Les fédérations sont appelées à présenter des listes avec les partenaires associatifs et les personnalités qui ont fait le succès de la campagne européenne. "Chez nous, en Rhône-Alpes, on part en autonome au premier tour, c'est non négociable", assure Michèle Rivasi, députée européenne du Sud-Est qui espère que ses camarades arriveront en tête. Même son de cloche en Languedoc-Roussillon : "Avec Frêche, il n'est de toute façon pas question d'imaginer une entente", explique Jean-Louis Roumégas, patron des Verts de la région. Qui ajoute : "Même dans les régions où les Verts sont dans la majorité sortante, il n'y a pas de doute sur cette ligne."

Pour le second tour, tous jurent que l'enjeu est de garder "les régions à gauche" mais le prix de la négociation sera élevé.

Le Parti communiste. La stratégie doit être discutée au conseil national, vendredi 19 juin. Marie-George Buffet a déjà donné le la : "On continue le Front de gauche et on l'élargit." "Nous voulons rester sur l'espoir créé le 7 juin et travailler à des projets de région plus solidaires", renchérit Olivier Dartigolles, porte-parole. Reste à sauver les centaines de conseillers régionaux élus sur les listes d'union de la gauche.

jeudi 11 juin 2009

Le capitaine seul à la barre !

Notre opinion

On se console comme on peut.Dimanche soir, le grand jeu des commentateurs de gauche consistait à faire l’addition de toutes les voix de gauche pour pouvoir dire : arithmétiquement, la droite est battue. Politiquement, elle avait gagné – et pas seulement en France, dans toute l’Europe.Nicolas Sarkozy s’attendait à un succès, mais pas à ce point.

Car le voici sans personne en face.Ce qui lui donne une liberté de mouvement plus grande encore avant que ses concurrents futurs n’aient le temps de lui disputer le terrain. Ce succès, qui laisse devant lui une gauche pantoise et désolée, il le doit à son sens du jeu et aux fautes de ses adversaires.

La crise aurait pu le faire trébucher. Il s’est appuyé sur elle pour multiplier les initiatives, depuis sa présidence de l’Union européenne et sa course pour créer le G20, jusqu’à sa déclaration conjointe avec Angela Merkel en fin de campagne électorale. Face à la crise, c’est lui qui protège, qui veut moraliser le capitalisme, maintenir des frontières, fermer la porte à la Turquie. Il prend la gauche à contrepied, la prive de ses repères. S’il ne ramène pas la confiance – celle-ci ne reviendra qu’avec la reprise –, il montre, à l’étranger comme ici, qu’il y a un capitaine à la barre.À qui rien ne fait peur.

De ce point de vue, la succession de grandes manifestations, qui se sont déroulées depuis le mois de janvier et qui vont se conclure ce samedi 13 juin, l’a servi au lieu de le mettre en difficulté. Il a d’abord réagi en souplesse en mettant en oeuvre un “plan social”, sans rien changer ensuite malgré les surenchères.Les défilés, toujours grossis par les fonctionnaires,absorbaient le débordement d’angoisse de certaines catégories de salariés tout en limitant la violence dans les usines menacées de fermeture faute de commandes.

La campagne électorale a interrompu cette violence radicale, faite d’enlèvements, de séquestrations, de destructions de machines, et le jeune Besancenot a dû plier ses drapeaux rouges le soir du 7 juin. À aucun moment, depuis le début de la tension sociale – doublée par la crise universitaire –,Nicolas Sarkozy n’a perdu la main.Au jour du scrutin, les couches populaires ont préféré s’abstenir en attendant la suite plutôt que de voter pour la gauche.Tandis que la droite classique se déplaçait en bon ordre.

Martine Aubry savait qu’elle courait à l’échec.Les sondages le lui disaient.Pourquoi ne l’a-t-elle pas anticipé ? Elle est restée comme tétanisée par une droite offensive et réactive. Elle n’a pas su rassembler son camp et elle a attendu le soir d’une défaite plus cruelle que prévue pour parler de rassemblement, de reconstruction et de projet. Que ne l’avait-elle fait ? Quelle sera sa légitimité pour incarner la ligne du parti et lui imprimer l’énergie indispensable à une campagne présidentielle ? La perspective des élections régionales, au printemps 2010, ne lui est même pas favorable : tous les barons du parti élus à des présidences de conseil régional vont s’empresser de négocier chez eux comme ils l’entendent, ne laissant à la tête du parti qu’une direction faible. Il suffit,pour s’en convaincre, d’écouter ces joursci les déclarations de Gérard Collomb, le maire de Lyon.

François Bayrou comptait sur cette faiblesse du parti socialiste pour lui ravir sa place.Mais il a commis une de ces fautes stratégiques qui ne pardonnent pas en politique.Nous l’avions dit ici même : l’antisarkozysme ne suffira pas.Son hostilité au chef de l’État l’aura obsédé jusqu’au point de le faire trébucher en public – devant Daniel Cohn-Bendit, sur le plateau de France 2. Il s’est trompé d’“abus de pouvoir”. La question n’est pas de comparer Nicolas Sarkozy à un monarque. La comparaison a déjà été appliquée au général de Gaulle, à Valéry Giscard d’Estaing,à François Mitterrand,et même à Jacques Chirac. C’est une illusion de croire que cela dérange les Français.L’élection présidentielle au suffrage universel est un sacre. Ils veulent un responsable au sommet. Surtout par temps de crise.L’“abus de pouvoir”n’a amusé que les bobos mais il a aveuglé son auteur, brutalement ramené sept ans en arrière.

Nicolas Sarkozy n’a donc pas besoin d’un second souffle ; il ne va changer ni de gouvernement ni de politique. En revanche, il aura trouvé dans le scrutin du 7 juin de nouveaux atouts : celui-ci lui laisse prévoir la ratification finale du traité de Lisbonne par les Irlandais en même temps que la victoire prochaine d’Angela Merkel aux élections législatives allemandes du mois de septembre. Cela ne peut que le renforcer dans l’idée qu’un boulevard d’initiatives s’ouvre devant lui, en Europe et pas seulement en France.

mardi 9 juin 2009

Européennes : l'analyse des résultats, région par région


Directeur du Centre de recherche politique de Sciences Po Paris, Pascal Perrineau met en perspective les résultats des élections européennes avec les traditions électorales de chaque région.

Ile-de-France. Le PS y subit une cuisante défaite, en étant largement devancé par la liste Europe Ecologie de Daniel Cohn-Bendit (20,87 %, quatre sièges). Menée par les ministres Michel Barnier et Rachida Dati, la liste UMP obtient 29,59 %, contre 17,79 % en 2004. La liste PS, menée par Harlem Désir, n'obtient que 13,57 %, contre 25,02 % en 2004. Le porte-parole du PS, Benoît Hamon, député européen sortant n'a pas été réélu. Comme dans le reste de la France, le MoDem a subi un revers (8,53 %), seule Marielle de Sarnez étant réélue. Pour Pascal Perrineau, directeur du Centre de recherche politique de Sciences Po, les cadres et les intellectuels parisiens ont joué un rôle décisif : (01:02)

Nord-Ouest. L'UMP arrive largement en tête avec 24,22 % et quatre élus, et double quasiment son score de 2004. Le PS est devancé dans les quatre régions de la circonscription (Nord-Pas-de-Calais, Picardie, Basse et Haute-Normandie), pourtant toutes dirigées par des socialistes. Europe Ecologie a presque doublé son score (12,10 % contre 6,83 %, un élu) et le Front national est en légère baisse (10,18 % contre 12,86 %, un élu), mais Marine Le Pen est réélue au Parlement européen. Le FN obtient dans cette région le meilleur score national du parti. Le MoDem (8,67 %) et le Front de gauche (6,84 %) comptent chacun un élu. Pascal Perrineau estime que le PS essuie un échec particulièrement cinglant dans cette région : (01:13)

Ouest. Retournement de situation cinglant pour le Parti socialiste, qui était arrivé en tête en 2004 : dans tous les départements, l'UMP remporte la majorité des suffrages. La majorité présidentielle menée par Christophe Béchu remporte ainsi 3 sièges, devant le PS (19 %, 2 élus). Europe Ecologie remporte 2 sièges, avec notamment l'élection au Parlement européen de Yannick Jadot, ancien de Greenpeace. La tête de liste du MoDem, Sylvie Goulard, est élue. Enfin, Philippe de Villiers conserve son siège de député européen, grâce à un bon score en Vendée. Selon Pascal Perrineau, l'UMP a su reconquérir cette circonscription : (01:30)

Sud-Ouest. Avec moins de 18 % des voix, le Parti socialiste s'est là aussi effondré : il devra se contenter de deux sièges. La liste UMP de Dominique Baudis est arrivée en tête avec 26,6 % des voix, et envoie 4 élus au Parlement européen. Les écologistes conduits par José Bové ont, comme au niveau national, fait une percée significative en récoltant 15,7 % des suffrages et 2 sièges. A Bordeaux et Toulouse, ils ont même obtenu respectivement 22,34 % et 22,04 % des suffrages. Le MoDem, conduit par le président du Credoc, Robert Rochefort, ne parvient pas à faire mieux que 8,6 % (1 élu), devançant d'un cheveu la liste Front de gauche (8,15 %), conduite par Jean-Luc Mélenchon. Le sénateur de l'Essonne devrait donc abandonner le Sénat pour le Parlement européen. Pascal Perrineau analyse le nouveau rapport de force dans le Sud-Ouest : (01:18)

Est. Joseph Daul, tête de liste de l'UMP, sortant dans l'Est, a remporté son pari : il a été réélu avec 29,30 % des voix (4 sièges), devançant largement les listes PS (16,89 %) et Europe Ecologie (14,52 %), conduites par Catherine Trautmann et Sandrine Bélier. Le MoDem a fait à peine mieux que le Front national (9,43 % contre 7,66 %, un siège chacun). Pascal Perrineau estime que la droite retrouve sa place traditionnelle : (01:07)

Sud-Est. La liste UMP, conduite par Françoise Grossetête, députée sortante, réalise un bon résultat, avec 29,5 % des voix, et envoie cinq élus à Strasbourg. La liste PS conduite par Vincent Peillon réalise un score décevant et ne remporte que 2 sièges ; le député sortant avait abandonné sa région Picardie pour se présenter dans le Sud-Est. La bonne opération est réalisée par la liste Europe Ecologie menée par Michèle Rivasi : avec 17,3 %, les écologistes enverront trois députés au Parlement européen. Le MoDem, emmené par l'ex-écologiste Jean-Luc Bennahmias, n'arrache qu'un seul siège avec 7,50 % des voix. Les centristes sont dépassés par le Front national, qui obtient 8,5 % des voix, sauvant le siège de Jean-Marie Le Pen. Pascal Perrineau revient sur le parachutage du socialiste Vincent Peillon dans cette circonscription : (00:54)

Outre-mer. L'UMP retrouve la première place aux élections européennes dans la circonscription outre-mer. Mais, paradoxalement, sa tête de liste Marie-Luce Penchard, tout comme Ericka Bareigts (PS), n'ont pas été élues lors d'un scrutin au taux de participation très faible (23,12 %). L'ancien député Elie Hoarau (PCR) arrive en tête dans l'océan Indien. Le Néo-Calédonien Maurice Ponga (UMP) est élu dans le Pacifique et le vice-président du conseil régional de Guadeloupe, Patrice Tirolien (PS), en Atlantique, malgré un mauvais score (15,58 %).

Ce résultat paradoxal est lié à un système électoral complexe inauguré lors de ce scrutin. Destiné à permettre l'élection d'un député européen pour chaque grande zone géographique de l'outre-mer, il tient compte à la fois du score global et du résultat par zone.

COUPLE FRANCO-ALLEMAND Angela Merkel et Nicolas Sarkozy se retrouvent jeudi à Paris

Angela Merkel et le président français Nicolas Sarkozy, dont les formations ont remporté haut la main les élections européennes dimanche, doivent se retrouver jeudi à Paris pour des entretiens sur l'Europe, selon l'agenda de la chancelière allemande lundi. Au centre des discussions figurera la préparation du Conseil européen des 18 et 19 juin, indique la chancellerie. Angela Merkel doit recevoir mardi à Berlin le Premier ministre tchèque Jan Fischer, dont le pays passera fin juin le relais de la présidence semestrielle européenne à la Suède. Le même jour, la chancelière doit également rencontrer José Manuel Barroso, qui grâce à la victoire dimanche des partis conservateurs devrait sans problème être reconduit à la tête de la Commission européenne.

Les conservateurs CDU/CSU d'Angela Merkel et UMP de Nicolas Sarkozy ont remporté respectivement 37,9 % (provisoires) et 27,87 % (définitifs) des suffrages. Selon Der Spiegel, la chancelière et le président doivent également discuter des problèmes de l'avion de transport militaire européen Airbus A400 M. Mme Merkel s'engagerait "pour la poursuite" du programme en dépit de son important retard, selon l'hebdomadaire. Les sept pays engagés dans le programme l'Airbus A400 M (France, Allemagne, Espagne, Royaume-Uni, Turquie, Belgique et Luxembourg) se sont donnés jusqu'au 1er juillet avant toute décision sur l'avenir de cet avion. Les pays membres du consortium d'acquéreurs avaient la possibilité, depuis le 1er avril, de dénoncer les contrats, le constructeur EADS n'ayant pas respecté son engagement de procéder à un vol inaugural en janvier 2008.

EUROPÉENNES Sarkozy salue la victoire de l'UMP et annonce des "initiatives"


Nicolas Sarkozy est sorti de sa réserve pour commenter les résultats des élections européennes en saluant la victoire... de l'UMP . "La majorité présidentielle a remporté hier un succès. Les Français ont marqué leur reconnaissance pour le travail accompli pendant la présidence française de l'Union européenne et leur soutien aux efforts engagés par le gouvernement pour sortir d'une crise mondiale sans précédent", indique lundi l'Élysée dans un communiqué. "Mais le président de la République sait les attentes des Français. Ce succès aux élections européennes commande d'aller plus loin. L'Europe doit changer. Les réformes doivent continuer. Le président de la République prendra dans les jours qui viennent des initiatives ouvrant de nouveaux chantiers", poursuit le texte, sans plus de détails.

Le bon score de l'UMP constitue une victoire personnelle pour le chef de l'État, ce qui lui donne aussi une grande latitude pour procéder au remaniement attendu, qui lui permettra à la fois d'éliminer les maillons faibles de l'équipe gouvernementale et à la fois de poursuivre l'ouverture. "Rien ne presse", dit-on à Matignon. Selon plusieurs sources gouvernementales, la modification de l'attelage de l'exécutif ne devrait pas intervenir cette semaine. Au plus tard, le président de la République a jusqu'au 13 juillet, veille de la première réunion du nouveau Parlement européen, mais tant à l'UMP qu'au gouvernement, tous s'accordent à l'envisager plutôt d'ici la fin juin.

Une chose est sûre : sauf énorme surprise, François Fillon devrait rester aux commandes. Tout au long de la campagne, il s'est affirmé comme le véritable chef de la majorité, éclipsant sur la scène des grands meetings le secrétaire général de l'UMP Xavier Bertrand et le patron des députés du parti Jean-François Copé, qui lui en dispute le leadership. Autre fait acquis : Nicolas Sarkozy devra remplacer deux de ses ministres élus dimanche, la garde des Sceaux Rachida Dati et Michel Barnier à l'Agriculture. Pour le reste, rien ne semble vraiment acté. Même si le jeu reste très ouvert, quelques ministres semblent menacés, comme Christine Boutin au Logement ou Roger Karoutchi, attaché aux relations avec le Parlement, et affaibli par sa défaite aux primaires pour les régionales face à la ministre de l'Enseignement supérieur Valérie Pécresse.

Diversité, ouverture

L'importance du score de l'UMP pourrait donner une "prime" aux ministres "clairement identifiés de droite" ou aux sarkozystes historiques, à l'image du député-maire de Nice Christian Estrosi, qui pourrait hériter d'un secrétariat d'État à la sécurité publique, relèvent des conseillers d'un ministre. Désireux de quitter son poste à l'Éducation nationale, Xavier Darcos pourrait hériter de la Justice. Mais qui pourrait le remplacer rue de Grenelle ? Les prétendants ne se bousculent pas. Un nom circule toutefois : Luc Chatel. Membre de la garde rapprochée du chef de l'État, le porte-parole du gouvernement est souvent cité. "Pour supprimer 13.000 postes, il faudra quelqu'un marqué à droite", prédit l'une de ses collègues. Autre scénario possible : Jean-Louis Borloo, avocat de formation, pourrait quitter son ministère de l'Écologie pour la place Vendôme. À l'inverse, la volonté prêtée au Président de vouloir affaiblir le MoDem en recrutant le sénateur centriste Michel Mercier, trésorier de ce parti, est aujourd'hui moins pertinente après le très mauvais score de François Bayrou.

Par ailleurs, avant le scrutin, l'entourage de Nicolas Sarkozy martelait le souci du Président de poursuivre l'ouverture. Ainsi, le nom du maire adjoint à la culture de Paris, Christophe Girard, est revenu avec insistance pour remplacer Christine Albanel, qui pourrait payer le prix des ratées de la loi sur le téléchargement. L'intéressé a affirmé dimanche soir à nos confrères de l'agence France-Presse que l'offre ne lui avait pas été faite. "Si le président de la République me le propose, je lui demanderai une heure pour en parler à Bertrand Delanoë", a-t-il lancé. Mais une telle avance du parti présidentiel sur l'opposition pourrait aussi conduire Nicolas Sarkozy à réduire la voilure de l'ouverture. "On en voit un peu moins l'urgence et l'utilité", note une source gouvernementale. Pour répondre à un autre cheval de bataille du Président, la diversité, une femme issue d'une minorité, pourrait rejoindre le gouvernement, compensant le départ de Rachida Dati. Pourquoi pas Fatine Layt, femme d'affaires de 42 ans d'origine marocaine, qui aurait aussi le mérite de maintenir la parité ?

APRÈS LE BIG BANG DES EUROPÉENNES Ce qui va changer dans la vie politique

Et maintenant ? Face au nouveau paysage politique dessiné dimanche soir, les regards se portent vers l'avenir. Avec, à la clé, beaucoup de questions.

D'abord, que fera Nicolas Sarkozy de son incontestable succès ? Il sait que 28 % est une très bonne nouvelle pour la majorité présidentielle, mais que l'addition des oppositions reste forte. Le chef de l'Etat a réussi à pulvériser ses adversaires potentiels pour la prochaine présidentielle - PS et Modem - mais il doit construire une majorité de second tour en vue de 2012.
Pour cela, les leaders UMP dimanche soir l'ont joué modeste , laissant entendre que la victoire imposait des devoirs. Nul doute que le président entend ainsi continuer l'ouverture, tenir compte de l'aspiration écologique des électeurs et miser sur la poursuite des réformes. Le prochain remaniement devrait porter ces marques de fabrique du sarkozysme et préparer l'échéance suivante, les régionales, où la droite est en posture de reconquête. Face à lui, il n'y a plus que ruine et désolation.

Le Parti socialiste a pris une claque d'une ampleur stupéfiante , qui va entraîner des remises en cause de sa ligne et de son mode de management. Si Martine Aubry survit à ce désastre, elle sera encadrée et priée d'écouter les dirigeants du parti qui proposent de tout changer. La Bérézina est telle que la responsabilité ne peut être que collective. Les Français ont fait payer aux candidats roses le congrès de Reims et ses suites. Le message est clair, même si la question du leadership est moins que jamais réglée. On peut être certain que Ségolène Royal et François Hollande vont sortir leurs armes anti-Aubry.
Mais comment remonter une telle pente sans un consensus qui semble introuvable ? La suite, rue de Solférino, s'annonce noire, pour de longs mois au moins.

Côté Modem, c'est encore pire. François Bayrou a beau renaître de ses cendres après chaque échec, cette fois-ci, cela va être très dur. Sa seule porte de sortie sera d'engager un accord avec le PS et les écologistes en vue des régionales. Pour quelqu'un qui voulait faire la course en tête de l'opposition, c'est humiliant. Ses derniers partisans risquent en outre de s'égailler dans la nature, comme ils viennent de le faire lors de ce scrutin. On ne sait si c'est totalement l'intérêt de Nicolas Sarkozy d'avoir soulagé le PS d'un concurrent. Mais le fait est là : François Bayrou est blessé, peut-être à mort. Il va devoir remiser, pour un temps en tout cas, ses ambitions au vestiaire.

Enfin, que fera Daniel Cohn-Bendit de sa victoire ? Il a redit dimanche soir son désintérêt pour la présidentielle française. Mais il a dessiné l'alliance qui devrait, selon lui, prévaloir à Strasbourg : PS-Verts-centre. C'est sans doute la formule qu'il va pousser dans l'Hexagone, d'autant plus facilement qu'il n'est candidat à rien. Son score spectaculaire va, quoi qu'il arrive, peser sur les programmes des uns et des autres : l'environnement sera sûrement au coeur des prochaines batailles. Nicolas Sarkozy l'a déjà compris. On va s'en apercevoir dans les tout prochains jours.